Disclaimer : À ce jour, aucune réponse officielle de l'administration fiscale, ni antécédent judiciaire, ni texte de loi, ne permet d'affirmer avec certitude si la valeur imposable par année transmise par Amazon à l'administration fiscale donnera lieu à une quelconque imposition à l'avenir. Les informations qui suivent sont libre d'interprétation, et c'est uniquement à vous de décider quel est le risque, et si ce dernier vaut la peine d'être pris.
Directive DAC7 : Qu'est ce que c'est ?
La directive qui soulève toutes ces questions s'appelle le dispositif DAC7 (Directive on Administrative Coopération). Il s'agit d'une initiative européenne de transparence fiscale adoptée en 2021 et entrée en vigueur le 1er janvier 2023. Elle se base sur le fait que les ventes de biens et de services, et les locations de bien immobiliers et de moyens de transports, dissimulent beaucoup de revenus non-déclarés. Parmi ces dernières, on trouve notamment les activités commerciales (Ventes de biens et de services) exercées sans immatriculation professionnelle, et donc sans versement de cotisations, d'impôts et de taxes. De telles activités sur des plateformes en ligne pouvaient jusqu'à présent être faites avec un compte identifié comme un particulier par les plateformes, alors que la fréquence d'activité, le volume de vente, ou les sommes perçues, relevaient d'une activité professionnelle. L'idée de cette directive est donc de pouvoir détecter des cas où une requalification en activité professionnelle serait nécessaire.
Notez qu'il existe beaucoup d'autres cas, comme les locations régulières déguisées en locations saisonnières, mais qu'ils n'ont aucun rapport avec Vine, et ne sont donc pas pertinents à aborder ici.
L'impact sur les plateformes
Amazon, comme Ebay, Leboncoin, Vinted, et d'autres plateformes de reventes en ligne, se retrouvent dans l'obligation de transmettre certaines données sur l'activité des participants de leurs plateforme, à partir d'un certain seuil, si le nombre d’opérations réalisées dans l’année est supérieur ou égal à 30 ou si les montants perçus excèdent 2 000 €. Amazon dans le cadre du programme Vine ne semble pas tenir compte de cette limite, et envoie les données quoiqu'il arrive, peu importe le volume de commandes faites sur Vine. C'est cette transmission qui interroge, dans la mesure où on ne sait pas ce que l'administration fiscale va faire de ces données.
L'impact sur les Viners
En l'état, voici ce qu'il a été possible de savoir jusqu'à présent grâce au fil fiscalité, et aux retours de plusieurs membres du Discord, accompagnés de screenshots des questions et réponses posées, et des potentiels documents reçus en retour des questions :
Les centres des impôts sont de manière générale peu informés sur le sujet, et n'ont pas connaissance du programme Vine.
Les questions insuffisamment détaillées donnent lieu à des réponses à côté de la plaque, certains centres des impôts partant du principe qu'il s'agit d'une activité professionnelle rémunérée
Pour ceux qui ont eu la première salve de données transmises, à savoir les données de 2023 pour l'imposition de 2024, aucun montant n'a été reporté dans aucune case des déclarations d'impôts, laissant supposer qu'aucun procédé n'existe pour l'heure pour imposer automatiquement les personnes qui dépasseraient un quelconque seuil
La réponse la plus sérieuse d'un centre des impôts obtenue à ce jour est celle qui a eu la question la plus détaillée et fournie en documents et informations (Merci Megaman). Le résumé pourrait être le suivant : Pas d'imposition a priori, on ne rentre ni dans la case influenceurs, ni dans la case prestataire du fait de l'absence d'un contrat imposant une subordination (C'est du volontariat), et l'avis final c'est comme pour les plateformes de revente d'occasion. Il faudra dépasser un seuil arbitraire pour que potentiellement l'administration fiscale s'y intéresse et requalifie l'activité si par exemple il y a de la revente active derrière
Quels sont les risques ?
S'il n'y a pas de risque clairement identifié, les montants transmis par Amazon à l'administration fiscale, peuvent, selon les viners, aller de quelques milliers d'euros à plus d'une centaine de millier d'euros. Forcément, si une imposition devait se décider au cas par cas, sans base législative claire, un montant plus élevé serait plus à risque d'attirer l'attention de l'administration, et d'engendrer une imposition. Parce que le but n'est pas de vous laisser sans connaître les risques tant qu'il n'y a pas une législation claire ou une décision de justice faisant précédent et indiquant que non, les viners n'ont pas à être imposés, voici ce qui pourrait se produire sur la base législative actuelle :
Disclaimer : Tous les risques qui vous sont présentés sont indiqués avec l'article de loi correspondant. Un indice de probabilité est donné, mais uniquement basé sur la perception de l'auteur, et ne doit pas être pris comme comptant. Ce listing est avant tout là pour que vous ayez conscience de la base législative existante, et de comment l'administration fiscale pourrait l'interpréter dans certains cas. L'auteur n'est pas un expert en fiscalité
1) Requalification en activité professionnelle :
La réception de produits dont la valeur cumulée pourrait s'avérer suffisamment importante (Pas de seuil défini, mais à partir de 10000€ cela pourrait attirer l'oeil, peut être davantage en fonction de votre situation fiscale, revenus, etc…) pour être perçue par l'administration fiscale comme une source de profit. Elle pourrait alors être rangé dans “les bénéfices ou profits provenant d'occupations ou d'opérations lucratives à la condition que les sommes perçues ne soient pas rattachables à une autre catégorie de revenus.”
Conséquence possible :
Requalification de l'activité de Viner en activité professionnelle
Imposition sur la base de bénéfice non commerciaux (BNC)
Imposition sur la base des avantages en nature
Allant dans le sens de l'imposition :
Cet article est destiné aux revenus divers, qu'on ne peut pas rattacher à une autre catégorie, donc ça fait un peu fourre-tout de tout ce qui n'a pas d'imposition.
Un particulier peut être imposé avec des BNC sans structure type entreprise
L'administration fiscale pourrait considérer les objets obtenus via Vine comme une source de profits, ou une contrepartie à une prestation de tests et de publication d'avis
Un particulier peut être imposé sur des avantages en nature sans lien de salariat ou structure professionnelle, dans le cadre de donations
Une partie des objets obtenus sur Vine pourraient rentrer dans “La fourniture gratuite ou à tarif préférentiel de biens ou services vendus par l'entreprise”, potentiellement l'intégralité si on considère les vendeurs tiers comme pleinement impliqué dans le procédé
N'allant pas dans le sens de l'imposition :
Pas de jurisprudence trouvée concernant les tests
Pas de mention d'un cas similaire à celui des Viners dans les articles 82/92 du CGI
Pas de salariat, structure professionnelle ou lien de subordination clair avec Amazon, donc difficile de faire rentrer ça dans les avantages en nature
Même en cas de considération d'un avantage en nature, aucun barême ne régit les innombrables objets obtenus sur Vine, contrairement à d'autres avantages du genre (Ordinateurs, véhicules, logements, repas, téléphones, etc…)
Même en cas de requalification en activité professionnelle, l'absence de revente, l'utilisation des objets à des fins de tests en premier lieu, et l'absence de garantie sur l'état et le SAV classiquement fournit par un commerçant, rendrait la considération des objets obtenus difficile à qualifier comme une source de profit
Probabilité :
Peu probable, la situation d'un viner est vraiment à part des cas référencés jusqu'à aujourd'hui. Mais une somme très élevée en montant cumulé transmise par la DAC7 à l'administration fiscale par Amazon pourrait amener l'administration fiscale à s'intéresser à ce qu'est le programme, et à vouloir l'imposer si le jeu en vaut la chandelle. Dès lors, elle chercherait dans quelle case on peut rentrer. Difficile de dire le résultat qui en découlerait. Qui plus est, la réponse la plus complète obtenue à ce jour reconnait que l'activité peut ne pas être lucrative si elle reste dans le cadre du test gratuit, mais il y a fort à parier que cela dépend du volume des produits reçus.
Références :
Listing des solutions administratives et jurisprudences sur les BNC :
https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/2824-PGP.html/identifiant%3DBOI-BNC-CHAMP-10-10-20-40-20190902#:~:text=L
Article 92 du CGI
Article 82 du CGI
Définition des BNC
Liste des avantages en nature existants
Réponse du centre des impôts transmise par MegaMan
2) Requalification en activité commerciale
L'activité de publication d'avis en échange d'un produit “gratuit”, pourrait être perçue comme promotionnelle et assimilable à celle d'un influenceur
Conséquence possible :
Allant dans le sens de l'imposition :
Les avis publiés pourraient être considérés comme bénéficiant directement ou indirectement à Amazon et/ou à ses vendeurs, en leur apportant une visibilité accrue pour les deuxièmes, et en augmentant le volume de vente et donc les commissions perçues pour le premier
N'allant pas dans le sens de l'imposition :
L'activité d'influenceur est très promotionnelle, celle de Viner doit en théorie être impartiale, et le fait de donner des avis qui peuvent être mauvais invalident l'aspect promotionnel, puisqu'on enfonce un produit au lieu de le promouvoir
Les avis diffusés devraient avoir une forte exposition publique pour que l'activité puisse être considérée comme relevant de celle d'un influenceur. La section commentaires d'un produit pourra difficilement être considérée comme en étant une, les avis étant généralement nombreux, et un avis en particulier étant donc noyé dans la masse
La réponse de l'administration fiscale obtenue par MegaMan distingue clairement les participants à Vine des influenceurs
Probabilité :
- Très peu probable. Il n'y a pas beaucoup de choses à dire, l'activité d'un viner est très différente de celle d'un influenceur, aussi bien sur le fond que sur la forme.
Références :
Loi du 9 juin 2023 sur les influenceurs
Définition des bénéfices industriels et commerciaux
Réponse du centre des impôts transmise par MegaMan
3) Imposition classique
Le montant transmis par Amazon pourrait simplement être considéré par l'administration fiscale comme un revenu supplémentaire à imposer si le montant est assez important.
Conséquence possible :
Allant dans le sens de l'imposition :
Ces montants transmis dans le cadre de la directive DAC7 sont nouveaux, et leur interprétation et utilisation pourrait être mal faite, si l'administration fiscale considère ces revenus comme issue d'une revente d'objet sur Amazon, méconnaissant le programme Vine
N'allant pas dans le sens de l'imposition :
Relève de l'erreur, et de la solution de facilité
Devrait pouvoir être facilement contesté si assimilé à de la revente, puisqu'il n'y en a pas
Probabilité :
Très peu probable. Mais on n'est pas à l'abri d'une surprise si la masse de données transmise par la DAC7 se retrouve juste catégorisée comme “bénéfices issue de la revente d'occasion”. L'administration fiscale pourrait dès lors appliquer un seuil arbitraire à partir duquel le contribuable est imposé par défaut, sans considération de s'il y a une véritable activité derrière ou non.
Références :
Page dédiée du site des impôts sur l'économie collaborative et l'impact de la directive DAC7
4) Requalification en activité professionnelle indépendante
Le volume de tests et leur régularité pourrait amener l'administration fiscale à estimer qu'il s'agit d'une activité professionnelle à titre indépendant. Dès lors, cette considération dépendrait du temps dédié à l'activité, et la valeur des objets pourrait devenir imposable, même sans rémunération monétaire directe.
Conséquence possible :
Requalification en activité indépendante
Imposition au titre des bénéfices non commerciaux (BNC), et potentielles charges sociales (URSSAF)
Allant dans le sens de l'imposition :
N'allant pas dans le sens de l'imposition :
Sans contrat autre que l'accord testeur, sans lien subordination, objectifs clairs et conséquent sur le volume de tests à effectuer, et avec la différence de temps alloué à l'activité pour chaque viner, difficile de considérer ça comme une activité professionnelle
Sans rémunération monétaire, et de par le fait que les objets sont fournis dans le cadre du test, il serait difficile de faire valoir que la prestation donne une contrepartie de la part des vendeurs ou d'Amazon
La réponse de l'administration fiscale obtenue par Megaman ne va pas dans ce sens (Considération comme activité professionnelle)
Probabilité :
Rappels utiles pour les Viners
Les réponses que vous pourriez obtenir d'Amazon, qu'elles soient rassurantes ou non, ne font pas foi. Ce n'est pas Amazon qui écrit le code des impôts
Les réponses que vous pourriez obtenir d'un centre des impôts dans le cadre d'une question posée depuis votre compte impots.gouv.fr ne sont pas engageantes pour l'administration fiscale. Seule la réponse à un rescrit engage l'administration fiscale, mais uniquement pour la personne à l'origine du rescrit, et sous de nombreuses conditions (Voir la ressource “Explication des rescrits fiscaux”). Et rien n'oblige l'administration fiscale à répondre.
Rien ne semble indiquer au moment de cet article qu'une imposition aura lieu à l'avenir, mais rien n'indique formellement le contraire. Pour rappel, aux États Unis, les objets que les Viners commandent dans le cadre du programme Vine sont soumis à des taxes, ce n'est donc pas impossible qu'un jour cette situation soit transposée chez nous, bien que l'imposition aux États Unis soit faite de manière radicalement différente à la notre
La “Valeur imposable par année” et le rapport détaillé des objets commandés et de leur prix (ETV) dans le cadre du programme Vine, sont disponible dans la section “Compte” du site Vine (
https://www.amazon.fr/vine/account)
Ressources pour approfondir
Article écrit par L'avocat du Diable, merci à lui